par Céline CLAIRICIA
Du rêve à la réalité, du virtuel au réel, des Antilles à l’Amérique, de ses cours de théâtre du collège à son premier spectacle à 25 ans, Gilles Saint-Louis partage avec nous les débuts de sa carrière. Ce jeune humoriste ultramarin aimé de nombreux antillo-guyanais est en pleine expansion. Rude parcours, son témoignage démontre bien qu’avec passion et persévérance, rien n’est impossible dans la vie.
Parle-nous de toi !
J’ai toujours voulu être comédien. Depuis tout petit, je me suis toujours dit que je ferais du théâtre même si c’était une activité en parallèle avec mon métier. Ma rencontre à 13 ans avec Jamel Debbouze a été l’élément déclencheur. Quant au métier de comédien professionnel, il a pris forme depuis 5- 6 ans à peu près quand X-man m’a fait monter sur scène. J’ai toujours aimé faire rire. Je me suis alors conforté dans mes sketchs et mes vidéos. J’ai aimé la scène donc j’ai suivi cette voie. Quand on est comédien, on peut tout faire: pilote d’avion, pompier, être un animal ou une plante… tout ce qu’on ne sera jamais dans la vraie vie. C’est l’occasion de laisser place à sa créativité, à son ouverture d’esprit.
J’ai pris mes premiers cours de théâtre au collège entre midi et deux. J’étais le genre d’élèves à aller dans les clubs d’arts, de peinture sur soie ou de théâtre… Au lycée, j’en ai pris à l’extérieur auprès de Daniely Francisque car il n’y en avait pas dans l’établissement. En revanche, j’ai pris des cours d’audiovisuel ou il fallait manipuler la caméra et jouer la comédie. J’ai commencé aussi avec les 3G ( Gloria, Guillaume et Gilles). On réalisait des parodies de la société antillo-guyanaise. Pour ma part, je me suis beaucoup inspiré de sketchs de manière générale mais surtout ceux des Inconnus qui mettaient en scène la société française. Je suis ensuite parti en France hexagonale ou j’ai été accepté aux cours Florent.
Très récemment, j’ai fait un voyage aux Etats-Unis. J’y suis allé dans le but de rencontrer des comédiens qui font des vidéos et que j’admire. Challenge réussi, j’en ai rencontrés et j’y ai appris beaucoup. Je pense que j’y retournerai, les gens y sont très bosseurs. Cela m’a beaucoup plu et c’était très enrichissant comme expérience. De plus, c’est un pays que j’ai toujours aimé. C’était un rêve pour moi de mettre les pieds là-bas. Outre la comédie, il y a aussi la photographie qui a pris une place dans ma vie. J’ai toujours aimé regarder des photos mais jamais je ne m’étais dit que je voudrais en faire. Ce sont les circonstances qui m’y ont amenées. J’avais acheté un reflex pour les vidéos à l’époque des cours Florent et il y avait une option photo. Je me suis alors demandé pourquoi ne pas essayer et voilà que mes amis de classe ont jugé que j’avais l’œil et que je devrais continuer. J’ai aimé cela et je m’y suis laissé porter. Il est vrai que j’ai moins de temps pour m’y consacrer mais dès que je peux je développe cette passion.
Financièrement, comment as-tu procédé pour y arriver?
J’ai commencé avec Internet. C’est un outil formidable si on sait l’utiliser à bon escient. Mes vidéos se sont propagées de bouche à oreille. Elles ont été virales. Ma notoriété s’est créée peu à peu.
De manière générale, j’ai tout financé moi-même jusqu’à ce que je rencontre mon producteur Don Miguel qui m’a porté au succès. Il a aussi contribué au développement des partenariats avec Orange par exemple qui m’a pris en passion depuis le début.
En sachant que tu n’as pas toujours été soutenu par ton entourage, quelle a été ta force pour arriver jusque-là?
Se lancer dans la voie artistique est toujours un risque. Je pense que c’est le cas dans toutes les familles où les enfants veulent s’orienter dans cette voie sauf si les parents sont artistes eux-mêmes, et encore ! Cela reste à voir car ils connaissent les difficultés du métier. On ne considère pas cela comme un métier car il n’y a pas de fiabilité, pas de sécurité. On n’a pas de revenus fixes même quand on réussit. Donc non, je n’ai pas été encouragé dans cette voie. J’ai plus été incité à faire des formations diplômantes qui m’auraient permis d’obtenir des revenus fixes et un lendemain plus sûr. Ce qui m’a fortifié c’est ma confiance et ma foi en moi-même. J’aimais ce que je faisais et jusqu’à maintenant d’ailleurs. Je voyais aussi un certain potentiel dans la zone des Antilles Guyane notamment dans notre génération. Il n’y avait personne à qui se référer. J’ai été moi-même inspiré par d’autres tels que Jamel Debbouze et Jean-Yves Rupert par exemple et j’espère être demain une référence pour ceux qui suivront.
Comment as-tu géré ta paternité par rapport à ta carrière? Quels conseils donnerais-tu à ton fils pour son avenir?
Terrifiant et merveilleux ! D’abord terrifiant puis petit à petit merveilleux. Les responsabilités nous tombent dessus, on n’a pas vraiment le choix. On y fait face au fur et à mesure. Ce n’est pas plus mal car cela fait grandir. Créer ma carrière à ce moment n’était pas l’idéal. Cela n’a jamais été facile. J’aurais aimé être plus présent. Il y a une certaine distance entre mon fils et moi géographiquement. Je le vois grandir de loin. Je suis parti pour réussir et j’espère pouvoir faire sa fierté. Il est ma force au quotidien. Je veux être un modèle pour lui, être une personne de confiance et responsable, quelqu’un avec qui il pourra parler de tout et de rien. J’espère l’inspirer tant sur le plan professionnel que personnel.
Pour ce qui est des conseils, je lui dirai d’être fort à l’école. Mine de rien, tout ce que nous apprenons sert, peut-être pas la totalité mais la majeure partie. J’ai suivi des études de commerce et de marketing et cela m’aide beaucoup aujourd’hui. Je suis mon propre produit. Je dois me promouvoir et travailler ma pérennité. Les mathématiques me servent car je dois « me vendre ! » (boutade). Voilà, plein de détails qui me permettent de travailler convenablement.
Que peux-tu nous dire sur tes fans? Comment te sens-tu face à eux?
Ils sont tous simplement géniaux et surtout très réceptifs. Mon univers colle avec le leur. Je me rends compte que nous ne sommes pas si différents finalement. En même temps, je me dis qu’on ressemble à ceux à qui on plait. Ils sont toujours présents et je dois avouer que j’ai été surpris car ils ont été nombreux à se déplacer. Je ne pensais pas que j’aurais été amené à refaire mon premier spectacle du fait de son succès. Passer du virtuel au réel est extraordinaire. C’est hallucinant !
Tu es quelqu’un de très discret et très posé dans la vie quotidienne. Sur scène, laisses-tu place à un autre personnage?
En fait, sur scène c’est moi. J’avoue que je suis très discret mais dans la vie quotidienne, cela peut m’arriver d’avoir des moments ou je suis un vrai show-man. De manière générale, je suis très calme au point que ceux qui me connaissent ne me reconnaissent pas sur scène et inversement. Ce n’est pas un personnage. C’est mon « moi » extraverti. Je pense qu’il y a plusieurs « moi » en moi. Ce n’est pas une facette que je travaille. Je suis cette personne. Après, mes personnages, je les découvre au fur et à mesure et je les travaille quand je joue.
Quels conseils pourrais donner aux jeunes ultramarins sur le point de poursuivre leurs études?
Le conseil que je pourrais leur donner est de partir. Quand on grandit sur une île, on ne peut pas prétendre connaitre la vie. Il faut partir ailleurs et pas qu’en Hexagone, parcourir le plus de pays que possible, rencontrer du monde, découvrir de nouvelles cultures. Cela permet d’avoir une ouverture d’esprit. L’idéal est de voir le maximum, d’observer comment fonctionne l’étranger pour pouvoir rentrer un jour et améliorer notre territoire.
Quels sont tes projets pour les années à venir?
Je suis satisfait de mon parcours aujourd’hui et de ce que j’ai accompli. Mon objectif était de réaliser mon premier spectacle. J’aurais aimé l’avoir fait plus tôt. A 20 ans pourquoi pas? Aurais-je été prêt? Je ne sais pas, cela dit !
J’ai de nombreux projets ne serait-ce que pour les vidéos ou des idées de série également. L’une des plus grandes difficultés pour les réaliser reste bien sur le budget. Il faudrait créer et trouver des partenariats. Cela peut prendre du temps mais rien n’est impossible.
Oui, évidemment j’envisage un retour au pays. Mon fils y est donc ne serait-ce que pour des raisons personnelles j’y retournerai. Je n’ai pas véritablement de plan de vie. Je laisse la vie suivre son cours. Je me vois personnellement dans une situation familiale stable et professionnellement je veux juste être épanoui, ne pas être dans le besoin. Même si je ne suis pas riche pécuniairement, je veux l’être émotionnellement , être bien dans ma peau et vivre comme il faut.
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